La formation Prélude répond aux fonctions suivantes de la peine :
PUNITIVE
En participant à une formation Prélude, le justiciable « paie pour » l’infraction qu’il a commise. Il y a une réaction sociale au délit. Malgré le fait qu’il s’agisse d’une formation, la sanction n’en reste pas moins exigeante et contraignante pour le justiciable : respecter les règles de présence, de ponctualité, respecter et participer au travail de groupe pendant 50 heures, sur une durée de trois mois, après une journée de travail, un samedi…
« La formation, c’est une punition… ».« La formation, c’est pas juste 50 heures. En fait, c’est 3 mois » (propos recueillis auprès de nos participants).
La formation est exigeante également par le travail de réflexion qu’elle implique : revenir sur les faits, l’historique des faits (ligne du temps), parler de ses émotions, parler des conséquences sur soi, son entourage, la victime, son entourage. Certains prétendent préférer trois mois de prison que de devoir réfléchir sur le délit commis, de façon relativement exposante dans un groupe.
« Pour les personnes qui réfléchiraient pas spontanément, ça les oblige à le faire ». *
EDUCATIVE
La sanction est une formation. Le fait de la suivre en groupe renforce l’aspect éducatif. Le groupe agit comme « contenant », c’est une micro-société, un terrain d’expériences concrètes, un lieu de partage et de ressources…
En prison, ils sont enfermés, mais leur pensée est libre. La formation Prélude ne va certainement pas viser une forme de « formatage » en leur disant ce qu’ils doivent penser. Toutefois, ils seront amenés à participer et à réfléchir sur différents sujets, sous le regard des autres.
- En termes de SAVOIRS : fonctionnement de la justice, schéma conflit…
- En termes de SAVOIR ÊTRE : se responsabiliser, se décentrer, être sensibilisé à la diversité des opinions dans le groupe, faire une expérience de groupe, travailler sur le relationnel…
- En termes de SAVOIR FAIRE : respecter les horaires, les autres participants et formateurs, expérimenter des attitudes non violentes…
« Ca devrait être plus instruit à tout le monde, ça éviterait peut être de faire des conneries. Faire un stage comme ça, ce serait bien, ça éviterait peut être de « délinquer ». Faire prendre conscience des risques qu’il y a, Parce qu’on ne sait pas à l’avance quand on n’a pas été confronté. A choisir, c’est cent fois mieux de faire ça que d’aller en prison ! En prison, t’apprends rien ! »
« C’est pas mal qu’il y ait des personnes de tous les âges dans un groupe de formation, ça permet d’entendre les expériences de chacun, et de réfléchir à ses propres conneries ».
« Pendant tout le groupe, je me suis senti tenu. Et je me suis tenu à carreau ! »
PREVENTIVE
De nombreux aspects de notre formation peuvent participer à réduire les risques de récidive :
- Au fil du module « citoyenneté », les justiciables comprennent et se situent dans le système pénal. En connaissant les « règles du jeu » de la société, ils sont mieux à même de poser des choix « éclairés », qui tiennent compte des conséquences de leurs actes, pour eux-mêmes et pour ceux qui auraient à les subir.
« J’ai appris des trucs sur la loi, les sursis, enfin la loi quoi. Et réaliser comme je te disais, un acte, réfléchir deux secondes avant de faire une connerie. Je te dis je paie même le métro maintenant. Des conneries il m’en faut plus ».
« C’était bénéfique, ça m’a mis une barrière, ça m’a prévenu de ce que je pouvais faire dans le futur… et où m’arrêter ».
- La plupart des exercices de la formation visent la réflexion, la responsabilisation et le développement de compétences sociales non violentes.
- Le travail sur le délit, son contexte, ou encore le travail sur les croyances et les émotions, à travers le module « gestion de conflits », participent à la réduction des risques de récidive.
- Le travail en groupe offre par ailleurs un regard de la part de leurs pairs qui peut s’avérer tantôt soutenant, tantôt confrontant par rapport à leurs faits : « Moi je ne pensais pas que c’était grave, mais quand j’ai vu la réaction des autres du groupe… » .
REPARATRICE et RESTAURATRICE
Pour le justiciable :
- Réparer le lien entre le participant et la société : certains participants arrivent avec un sentiment d’injustice et se vivent comme victimes du système judiciaire, d’une société qui les exclut. En informant les justiciables sur le fonctionnement de la société et du système judiciaire, la formation est un lieu où ils peuvent parler et échanger autour de leur sentiment d’exclusion et d’injustice, et éventuellement, le faire évoluer.
- La formation et ses horaires décalés permettent de préserver l’insertion sociale des participants par rapport à l’emprisonnement (pas de perte d’emploi, de logement, préservation des liens familiaux et sociaux…).
Pour la victime :
- Sans qu’il y ait de rencontre avec la victime, la formation lui donne une place importante à travers le « module victime ». Cette sanction donne une place symbolique à la victime via différents exercices afin que son point de vue soit pris en compte.
- Via des exercices, le participant a la possibilité de s’ouvrir aux autres membres du groupe, à la diversité des opinions, au fait qu’il y a des victimes directes, indirectes, des dommages secondaires, à prendre conscience des conséquences sur les victimes et sur leur vécu… Cela peut amener les participants à se décentrer de leur point de vue et envisager le point de vue de l’Autre.
« Moi, ça m’a fait du bien. En prison, je pensais à moi, à mon injustice. La formation fait penser aux autres. Les dessins sont intéressants, la victime aussi change de place, de comment il peut me voir. »
« Si je me mets à leur place, j’voudrais pas qu’on me fasse ça, alors de quel droit je le fais aux autres ?… »
CURATIVE
La formation n’est pas une thérapie. On ne travaille pas avec des personnes qui sont problématiques, mais avec des personnes qui ont commis un délit. On travaille sur le lien de l’auteur avec les autres, avec la société, pas « sur » la personne directement.
La formation peut provoquer chez certains une démarche vers un suivi thérapeutique individuel. D’autres participants se réapproprient parfois le suivi thérapeutique qui figure par ailleurs dans leurs conditions.
La formation peut s’avérer curative par l’écoute et le respect des autres participants ;
« C’est fort intéressant, t’auras un autre regard sur les autres, toi-même, les règles en général. Tu verras un cadre avec des règles qui fonctionnent, ça va te réconcilier avec les règles, même avec les humains. Rapport avec les autres, moyens de s’engueuler sans se frapper la gueule, relations humaines, gestion de conflit. »
DISSUASIVE et PROTECTRICE DE LA SOCIETE
- En montrant qu’il y a une réaction sociale au délit commis, la justice montre qu’il y a une tolérance zéro par rapport aux faits qui peuvent paraître moins graves pour certains participants et vise à dissuader la commission de nouveaux délits.
- « C’est sévère pour ce que j’ai fait ! »
- En travaillant directement sur le délit commis et sur les conséquences victimes (à la différence des TIG, du sursis simple ou d’un classement sans suite), la formation Prélude présente un intérêt tant pour la société que pour la victime et contribue de ce fait à une fonction de protection de la société à plus long terme.